François Blaise a été commissaire de piste en F1 pendant plusieurs décennies. Il nous a déjà gratifié de photos prises sur le vif. Aujourd’hui il évoque un souvenir plus personnel, lié à la longue relation d’amitié qu’il a su entretenir avec Olivier Gendebien.
Classic COURSES
J’ai fait la connaissance d’Olivier Gendebien à l’occasion du Rallye du Maroc en 1953, il conduisait une Fiat 1100 améliorée par Conrero et avait débuté en sport auto par le rallye. Depuis une amitié s’était créée et nous avons eu l’occasion de nous revoir sur les circuits. Lorsqu’ Olivier a pris sa retraite, il habitait en Suisse et passait toujours par l’Alsace pour se rendre en Belgique. Il avait pris l’habitude de venir nous y saluer.
Olivier Gendebien était dans la vie un gentleman à la moralité irréprochable et avait reçu une grande éducation. Il pratiquait la course automobile pour son plaisir et avait les moyens d’acheter ses voitures. Il avait participé à de nombreuses disciplines du sport auto, comme les rallyes, les voitures de sport, et la F1.
En 1962 lorsqu’il prit sa retraite de pilote automobile je me suis posé deux questions à son sujet. La première pour quelle raison n’avait-il pas gardé en souvenir ses coupes et trophées ainsi que ses affaires de coureurs casques, combinaisons ? Je lui ai posé la question, et il me répondit qu’il n’était pas intéressé par les souvenirs et les biens de ce monde, il préférait en faire cadeaux à ses amis et fans.
Fresque ornant l'entrée du musée Wolfgang Von Trips à Horrem
Olivier Gendebien avait écrit un livre en 1972 intitulé : « Olivier Gendebien quatre fois vainqueur au Mans ». C’était un témoignage personnel direct, sur une carrière traversée de personnages étonnants : Enzo Ferrari, Fangio, Moss, De Portago, Von Trips et bien d’autres. Ce qui m’étonna dans son livre à la page 178 c’était son jugement au sujet de Wofgang Von Trips qu’il décrivait comme un curieux personnage, un mélange de qualités et de défauts, il ne le portait pas trop dans son cœur. Cela était ma deuxième question, pour quelle raison avait-il un jugement négatif envers son ancien coéquipier décédé ? Je n’ai pas pu avoir une réponse à ce sujet.
Vers la fin de sa vie en 1995, Olivier me demanda un service personnel. Il souhaitait se rendre au musée Wofgang Von Trips et se recueillir sur sa tombe. J’ai été surpris par sa demande mais heureux pour lui et sa décision de se rendre en Allemagne.
Je connaissais la secrétaire de Wofgang Von Trips madame Elfried Flossdorf qui était l’une des fondatrices du musée, c’est elle qui entretenait le musée avec Reinold Louis qui était l’auteur de livres sur Wofgang Von Trips. En novembre 1995 nous nous sommes donc rendus à Horrem sur invitation des responsables du musée. J’ai été surpris de voir Olivier Gendebien heureux de cette visite, il parlait de tous ses souvenirs de pilotes auto, il regardait avec attention ce musée, toutes ces photos, ces objets qui lui rappelaient succès et déboires. Olivier nous raconta sa course à la Targa Florio en 1961 ou il faisait équipe avec Wofgang Von Trips qu’ils gagnèrent avec beaucoup de chance à quelques kilomètres de l’arrivée.
J’ai été heureux d’avoir amené Olivier chez son ancien ami et coéquipier, c’était son souhait avant de disparaitre en octobre 1998. Mais le professionnalisme le plus accompli n’a jamais enlevé à Olivier Gendebien l’aristocratique et naturelle nonchalance de ses manières. Comme cela a été écrit dans un journal automobile, il y a, parmi les pilotes, les »sportifs » et les »artistes ». Olivier Gendebien faisait partie de ces derniers.
Olivier Gendebien signant le livre d'or du musée de Horrem
Olivier Gendebien avec l'auteur lors du Tour de France Auto à Saintes Marie Aux Mines en 1957. Epreuve qu'il remporta en 1957, 58 et 59 avec Lucien Bianchi comme coéquipier.
François Blaise
Photos © François Blaise