Un peu sonné. C’est ainsi que je suis sorti de Rétromobile. J’avais l’habitude de croiser au milieu de belles carosseries, comme si j’étais dans un musée et d’en sortir émerveillé. J’en ignore la cause mais ce ne fut pas le cas cette année. Les prix étaient-ils affichés en plus gros que les caractéristiques ? Les hôtesses étaient – elles plus dicrètes, elles aussi cachées par les multiples zéros ? Le livre – à vendre – qu’on m’a presque mis dans les mains pour attendre Erik Comas avec lequel je souhaitais discuter ? La surcôte de certaines voitures, proposées ici 50% plus cher que sur le marché ? Toujours est-il que j’ai eu comme une nausée. J’ai repris mon souffle devant le coupé Napoléon – Qui oserait appeler une voiture comme celà aujourd’hui ? (A part moi) avant de trouver refuge dans les boutiques, chez les artistes et artisans du salon. J’y ai repris mon souffle. Le rétablissement fut complet après une escale ravitaillement sur le stand « Limousin » et un bon dîner Classic COURSES. Les copains étaient là. Mon salon et moi étions sauvés !
Olivier Rogar
Le prix du rêve
Le temps où l’on tombait sur la bonne « occase », discutait, concluait, amassait de la « pièce », bricolait et roulait avec les copains, est passé. On y redoutait la panne. Celle qui retardait l’heure des agapes. Le temps des agents, des courtiers, des financiers est arrivé. Recherche « worldwide », négociations, contractualisation, locaux sécurisés, côte d’investissement… On redoute l’explosion de la bulle. Celle qui nous laissera avec une auto moins mobile qu’espéré.
« Oui la 2,7 RS (Porsche) fait 750» et devant le silence de déglutition du quémandeur, le marchand d’ajouter « mais j’ai cette formidable 914-6 à 250»… Inutile de préciser qu’on parle ici en milliers d’euros et que j’ai cru entendre dire « mon pauvre »… mais quand on hallucine ?…
« The times they are a changin’». Le vieux Bob a toujours raison.
Spéculations
Les populaires et leurs Clubs pittoresques ont disparu. Young-timers d’un côté et stands grands constructeurs de l’autre les ont remplacés. Rolls, Berliet, De Dion-Bouton, Hispano, Talbot, Bugatti, Facel : les grands Clubs se font discrets mais sont encore là. Les marchands par contre sont bien visibles. Anglais, français, allemands, néerlandais, suisses, belges, italiens. GT classiques en majorité et quelques très belles voitures de courses.
Certains continuent de mener vente et art de la mise en scène, avec de belles expositions de modèles rares. D’autres ont simplement déployé leur étal. Les prix affichés comme des trophées sont à tomber à la renverse tellement ils paraissent décalés avec la vraie vie. Stands fermés, personnel d’accueil : c’est le règne de l’entre-soi et le quidam n’a pas droit de cité. Le voici condamné à déambuler. Un peu barbouillé. Il se demande si le journal de 20h00 ne le baratine pas avec cette crise qui dure et fait mal à certains. Mais ce quidam est-il celui qu’on pense ? …
Avec ou sans rouille ?
La vente aux enchères Artcurial mettra – t elle un bémol à ces envolées ? Nous ramènera-t- elle sur terre ? Maintenant tout le monde connait la collection Baillon : une cinquantaine bien rouillée pour deux belles bien patinées. Des estimations qui laissent pantois suivies d’une vente qui a multiplié les plus optimistes par un facteur deux… Les hordes d’acheteurs sont là. Physiquement ou par téléphone. Sur place ou à des milliers de kilomètres. Dans la salle les bras se lèvent sans répi, mécaniquement. Les docteurs Folamour ont bien débarqué. 26 millions. Belle vente. Bravo. Maintenant on sait que les Ferrari comme neuves sont des voitures de parvenus et celles bien érodées que l’on hésiterait presque à montrer sont celles des esthètes. Le comble du raffinement.
Les « sans-rouille » seraient-elles désormais à l’automobile de prestige ce que les « sans-dents » (selon la dialectique présidentielle…) sont à notre humanité sociale ?
Banque et vieilles tôles
On en vient à reparler d’argent. Encore. Mais c’est normal. Il y a des choses dont la logique incertaine demande à être comprise. Il y a aujourd’hui une telle demande pour l’auto de collection, si possible avec laquelle on puisse rouler, se faire plaisir – vous connaissez beaucoup d’investissements qui permettent de prendre son pied tout en prenant de la valeur en vieillissant ?…. – et se faire voir en circuit, en rallye ou à St Trop, que l’offre n’est pas suffisante pour certains modèles.
Comme le marché s’élargit aux pays émergeants, la pression s’accentue. Des fonds d’investissement se constituent qui achètent et stockent en vue de revendre. A qui, à quel moment ? Aux pays qui s’ouvriront bientôt à l’importation de voitures anciennes probablement. Ce qui aura pour effet de faire monter davantage les prix. La France protège involontairement ses collectionneurs en faisant sortir la voiture de collection de l’assiette de l’ISF, ce qui en fait un placement intéressant compte tenu de ce qui vient d’être exposé. Pour autant, personne n’est à l’abri d’un changement de politique en ces temps de disette fiscale et il est par ailleurs probable que la majorité des acheteurs de la collection Baillon soient étrangers.
Etrangers. Oui. De nombreux pays ont des situations économiques florissantes, d’une part et d’autre part, il y a dans le monde des individus qui peuvent acheter ce qu’ils veulent, se connaissent et se sont créés une belle compétition entre happy fews pour qui parviendra à acquérir les plus belles pièces. Une Royale, une Ferrari P4 ou une 250 GTO serait à vendre, elle trouverait aussitôt acquéreur en battant, c’est certain, un record du monde.
Reine et DS
L’une à l’apogée d’une vision élitiste et traditionnelle voulue par un artiste en mécanique. L’autre descendante d’une ambition à la fois populaire et technologique voulue par l’esprit avant – gardiste d’un artiste en marketing. La reine de voitures ne fut pas celle des rois tandis que la DS fut « la » voiture emblématique de notre république laïque. Voitures contraires. Respect universel.
Je contemple la DS décapotable. A ma gauche une silhouette en costume ne m’est pas inconnue. « Mr Richards ? » « Yes », « Nice to meet you », shake hands, « Very pretty french car », « Yes, that’s our « Volante » , smiles. Ce n’est pas tous les jours qu’on serre la main d’un – ancien- propriétaire d’Aston-Martin.
Jean Pierre Wimille
Pierre Ménard nous en a parlé. Je n’ajouterai qu’un chose à l’émotion. En 1942 tandis que certains « réfléchissaient », que d’autres plongeaient dans un confortable exil, il y eut des pilotes comme Williams, Benoist ou Wimille qui s’engagèrent dans la résisitance. Les deux premiers y laissèrent leur vie. Wimille s’en sortit. Qui plus est en ayant étudié ce prototype. En pleine guerre. Chapeau.
Petit commerce
Mais alors….que diable le quidam va-t-il faire dans cette galère ? Il va simplement admirer, se procurer un livre, une pièce détachée, un joint (en caoutchouc), une miniature… Mais avec la manière. Il va discuter. Echanger. Communier à cette passion partagée. Et c’est ce qui rend ce salon malgré tout unique. Il n’a pas encore perdu son âme et le mérite en incombe à ces visiteurs lambda, à ces exposants de fripes, de pièces, d’accessoires, ou d’outillage. A ces libraires, français, italiens, anglais qui se bougent pour vous trouver un bouquin, à ces petits exposants qui sont toujours heureux de prendre le temps de parler. Sans oublier les discussions toujours sympas qu’on peut avoir dans les restaurants du salon, sur certains stands, loin des espaces VIP, entre passionnés et copains.
Talents
Bernard Asset
Paul Smith
François Chevalier
Valentines
Osca 1600 GT. Tomber. Se relever. Les frères Maserati.
Lamborghini Miura. Comme Ava Gardner, ça brûle mais ça ne se discute pas.
De Tomaso. Le meilleur des deux mondes ?
Bugatti 35. LA voiture de Course
Mercedes C111 . Chef d’oeuvre. Monsieur Paul Bracque.
Porsche 917 – Le génie de Ferdinand Piech
Bentley
Shelby 350
Porsche Carrera 6 : La première victoire à laquelle j’ai assisté. Course de Côte de Saint Antonin. 1966 – 67 ? J’ai fait faire à ma tante tous les magasins de jouets d’Aix pour en trouver une petite !
Classic COURSES
Apéro offert par Jean-Paul Brunerie sur le stand « Limousin en anciennes ». Puis dîner des auteurs en compagnie de Bernard Asset – qui a pris cette photo – et de Michel Ribet, Président de l’Automobile Club du Midi (ACM) et initiateur du projet de création d’un Musée à Comminges. Autour de la table en partant de la droite , donc : Alexandre ( ACM) , Michel Ribet ( ACM), Eric Bhat, Olivier Favre, Jacques Vassal, moi, Madame Fiévet, René Fiévet.
Illustrations : Dîner Classic Courses @ Bernard Asset Apéro Classic Courses @ Jean-Paul Brunerie Autres photos @ Olivier Rogar