GP de l’ACF 1963
21 avril 2021

Petits compléments au « cadeau » de Gérard Crombac – Reims 1963

Les photos commentées ci-après constituent un troisième complément au « cadeau » de Gérard Crombac dont il a été question dans une note précédente, et se rattachent, quant à elles, au meeting que le circuit de Reims-Gueux accueillit en 1963.   

Professeur Reimsparing

GP de l’ACF 1963 

Le Triangle magique hérite de cette appellation officielle pour l’avant-dernière fois,  

 

GP de l’ACF 1963
Tony Maggs – Cooper – Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Au bout d’une corde… 

A l’époque, ce sont les garages rémois qui, pour des raisons de commodité, abritaient les voitures des principales écuries. Ces dernières se trouvaient alors face à une alternative pour permettre à ces mêmes voitures de rejoindre le circuit en empruntant la seule voie utilisable, à savoir, via Tinqueux, la  RN 31, celle-là même qui, à partir du Thillois, devenait partie intégrante du tracé : soit par leurs propres moyens,  moteur ratatouillant à bas régime et conduites par un mécano ; soit inertes et tirées par une auto « normale », un mécano de nouveau au volant ; soit encore sur une simple remorque ; soit enfin, luxe ultime, à bord d’un transporteur. 

C’est la  deuxième option qui fut choisie, en ce dimanche matin, pour la Cooper de Tony Maggs, laquelle traverse ici, dans le plus parfait anonymat, le parking spectateurs en direction du tunnel donnant accès au paddock. Petit privilège tout de même, la voiture tractrice est une Jaguar !  

L’auteur de ces lignes se souvient par ailleurs qu’installé dans la tribune du Thillois, lors des essais du vendredi,  il avait vu apparaître et virer à gauche, venant de Reims, par la RN 31, donc, un break DS 19 qui remorquait, au bout d’une vulgaire corde également, une superbe Lotus 25 aux roues jaunes portant le n° 18 ; cet équipage disparut sur la ligne droite qui allait lui permettre de rejoindre le paddock par le circuit. Il s’agissait de  la voiture du futur vainqueur, mais on ne le savait pas encore.   

 

GP de l’ACF 1963
Graham Hill – BRM- Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

La tension monte 

Le « défilé », de nouveau. 

La BRM de Graham Hill, qui porte comme l’année précédente le numéro 2,  est poussée vers son emplacement, inchangé également, au centre de la première ligne et à gauche de la Lotus de Jim Clark, cette fois encore auteur de la pole. Pour ces deux-là, les années se suivent et se ressemblent. 

Toutefois, elle exhibe désormais un nez orange (aucun rapport avec le goût   bien légitime de son pilote pour la bonne chère)  et, surtout, elle est nettement plus fine.  C’est en effet la première sortie de la plus récente version du bolide offert par l’écurie de Bourne  au champion du monde en titre pour (essayer de) rivaliser avec l’« Ecossais Volant ». On observe également qu’elle bénéficie cette fois  des soins de trois mécanos vêtus à l’identique d’une combinaison orange du plus bel effet. La modernité est déjà « en marche » (avant, bien sûr…). 

 

GP de l’ACF 1963
Lotus n°18 – Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

On its way to victory, but slowly  

Coucou, la revoilà, aux bons soins de trois mécanos du Team Lotus, la Lotus n° 18. Ce sera donc le numéro gagnant. 
Le plus petit, à droite, est le Sud-Africain Cedric Selzer, dont il a été question dans une note précédente, à propos du GP d’Allemagne 63.  

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Meilleur des battus 

A droite, la Cooper de Tony Maggs, désormais livrée aux bons soins de son pilote. On distingue la mince pour ne pas dire filiforme silhouette de celui-ci, moulée dans une combinaison bleue, lequel est loin de soupçonner que cette modeste voiture allait l’amener sur la deuxième marche du podium. 

Figurants, certes, mais non dépourvus d‘intérêt 

A gauche, la Lotus-BRM rouge de Joseph Siffert, accompagnée de son pilote, au casque caractéristique, que récompensera une très honorable sixième place.  

C’est une voiture identique, mais peinte aux couleurs de l’écurie BRP, qui l’accompagne, celle de Jim Hall, futur créateur des Chaparral et dont on  va reparler un peu plus loin.  

 

GP de l’ACF 1963
Trevor Taylor – Lotus – Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Un coéquipier qui ne passait pas inaperçu 

Tout de jaune vêtu et casqué, le fringuant Trevor Taylor, reconnaissable entre tous, mais surtout infortuné coéquipier d’un Jim Clark inabordable ; il n’en allait pas moins occuper une flatteuse  troisième place, avant que sa propre monture, la belle Lotus n° 20, ne le laisse bassement tomber.  

GP de l’ACF 1963
Dan Gurney – Brabham – Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Hello, Dan ! 

La proximité avec la piste est ici flagrante. On a le sentiment que s’il était (amicalement) interpellé avec suffisamment de conviction, le sympathique Dan Gurney, bien que paraissant veiller de près sur sa Brabham et casqué, détournerait la tête (à supposer qu’il n’ait pas zappé le briefing de Toto Roche en ayant déjà ajusté ses boules Quiès !).  

GP de l’ACF 1963
La grille s’anime – Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

La grille s’anime  

En première ligne, le futur vainqueur prend place dans son baquet ; Graham Hill, debout, attache son casque ; Dan Gurney cherche à convaincre la maréchaussée de ne pas lui dresser contravention pour stationnement manifestement illicite.  

GP de l’ACF 1963
Graham Hill a un problème – BRM- Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Problème de dernière minute ! 

Le traditionnel Clear the grid, please ! a retenti. Toto Roche, bien sûr, n’a pas obtempéré, en dépit de l’espace vital non négligeable qu’il occupe, mais, pour le coup, c’est normal. 

Problème cependant ! La BRM de Graham Hill ne démarre pas et celui-ci  lève le bras pour le signaler audit Toto, lequel réagira au quart de tour.  

GP de l’ACF 60  

« HiIl » remet ça !  

Celui-ci, en effet, a encore en tête le départ de 1960, lorsque la BRM de l’intéressé, alors à gauche de la première ligne, était demeurée immobilisée au baissé du drapeau, faute par son pîlote d’avoir pu enclencher la première. Heurté à l’arrière, par la Cooper de Maurice Trintignant, l’autre moustachu de la F1 avait dû abandonner sans avoir  parcouru un seul mètre. Quant à la Cooper de Lucien Bianchi, elle traversa toute la largeur de la piste vers la droite, renversant sans dommage majeur, fort  heureusement, l’une des personnes debout au bord de celle-ci.  

Dans son autobiographie,  Graham Hill n’a pas manqué de souligner que ce même Toto avait eu l’élégance de lui verser sa prime de (non)-départ ! 

GP de l'ACF - Reims 1960
Graham Hill – Phil Hill – GP de l’ACF – Reims 1960 (c) Professeur Reimsparing

Hill et Hill 

1960 toujours : Avant l’incident qui vient d’être rapporté, les deux Hill conversent de conserve, alors que Brabham, en pole, s’est déjà réfugié dans son cockpit, isolé du reste du monde. On pourrait imaginer, avec quelque mauvaise foi, le dialogue suivant : « Tu crois qu’il boude, mon cher Hill ? » « Aucune idée, mon cher Hill ! Et à vrai dire, peu me chaut / Je m’en bats l’œil / Je m’en tamponne le coquillard.» (Traduction IA ; la liste des options proposées est ici volontairement raccourcie).  

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Peu charitable, mais qui sait ?  Originairement, certes, c’est la couleur de la chevelure dudit Brabham qui fut à l’origine du surnom Black Jack. Mais une évolution plus subjective était sans doute inévitable, car l’intéressé ne s’est pas fait que des amis en raison de son comportement en piste ; Sir Jackie et Chris Amon le confirmeront ; et Jim Clark lui-même ne l’appréciait pas outre-mesure. Est-il besoin d’ajouter que plus tard, l’intéressé (si  l’on peut dire)  a précisé –  c’était son  droit il est vrai – que son meilleur souvenir était d’avoir défait la Scuderia lors de ce même GP de l’ACF 60 ?

GP de l’ACF 1963
Graham Hill – BRM- Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Revenons au présent (63) 

Toto Roche, instruit par l’expérience, donc, n’hésita pas une seconde : il autorisa deux mécaniciens de Graham Hill à pousser sa voiture jusqu’à ce que le moteur de celle-ci reprenne vie et qu’elle puisse regagner sa place légitime, laquelle, fort heureusement, se situait donc en première ligne. 

Lesquels mécaniciens se font éjecter autoritairement de la grille  Il est vrai que le temps presse : les moteurs rugissent.  

l’infortuné pilote écopera toutefois d’une minute de pénalité, qui, ajoutée à son temps réel, ne l’empêchera pas de terminer troisième, à un souffle de… Jack Brabham, que l’on distingue à gauche de la deuxième ligne, aux côtés de la Ferrrari de John Surtees ; eux-mêmes précédant la Lotus de Taylor, prise en sandwich entre les deux Cooper. 

Petit clin d’œil en passant 

Si l’on se reporte à la photo où Graham Hill lève le bras, on constate que Trevor Taylor, indifférent à toute cette affaire, s’est  tourné vers Innes Ireland et paraît lui faire signe. Le pilote au casque jaune ne solliciterait-il pas confirmation d’un accord antérieurement scellé avec ce bon vivant et visant à consommer ensemble quelques bières, place d’Erlon, after the race ? Why not ? A l’époque, le politiquement correct n’était pas de règle, fort heureusement. 

Entre-acte : Phil Hill 

 1 Grandeur et décadence… 

On distingue sur cette même photo,  tout à fait à droite, une voiture rouge à bande blanche. Il s’agit de la Lotus-BRM de Phil Hill, englué, comme avec sa misérable ATS lors du GP de Belgique précédent, dans la seconde partie de la grille. Apparemment, il n’était pas mieux loti. Ce que confirmeront ses problèmes au baissé du drapeau, lesquels lui vaudront de partir dernier avant d’abandonner dans l’anonymat le plus complet.  

Le temps était déjà loin où, en ces mêmes lieux, il démarrait de la première ligne sur sa Ferrari (59, 60, 61).  

De retour dans une écurie théoriquement plus prestigieuse pour la saison 64, à savoir Cooper, le Californien devait malheureusement conclure ses ultimes apparitions en F1 sans résultats probants. Mais, bien sûr, l’écurie de Surbiton n’était plus, à l’époque, ce qu’elle avait été. Bruce Mac Laren lui-même devait en souffrir. A quelque chose, malheur était bon, cependant, puisque cela le convainquit d’imiter son ex-coéquipier Black Jack et de créer sa propre écurie, entamant ainsi une saga ininterrompue depuis.  

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1000 km de Spa 1967
Phil Hill – Chaparral 2F – 1000 km de Spa 1967 (c) Professeur Reimsparing
1000 km de Spa 1967
Phil Hill – Chaparral 2F – 1000 km de Spa 1967 (c) Professeur Reimsparing

2 Mais adieux réussis… 

Grâce à un bel « oiseau du désert » baptisé « Chaparral », créé par Jim Hall,  lequel était loin de se douter du fructueux rapprochement à venir avec celui qui le précédait sur la grille ce jour-là. 

Affublé d’un spectaculaire aileron, paradoxalement destiné à le clouer au sol,  on voit ici l’oiseau en question aborder résolument l’épingle de « La Source » à Spa, lors des essais des 1 000 kilomètres 67, puis négocier celle-ci, comme s’il se fondait en elle. 

Hill se permit de décrocher la pole devant le gratin des prototypes de l’époque. Quelle revanche sur les GP de Belgique et de l’ACF 63 (entre autres).  

La même année, il avait déjà réalisé cet exploit lors des 1 000 kilomètres du Ring et failli le réitérer à l’occasion des 24 heures du Mans.  

Son comportement lors des ces trois épreuves – bien  aidé par Mike Spence –  fut à l’unisson Dommage qu’à chacune de ces occasions, des ennuis mécaniques l’aient empêché de parachever ces  manifestations d’un talent intact. 

Il est vrai que son bouquet final, il l’avait offert l’année précédente, en remportant au volant du bel oiseau en question – comme si celui-ci lui donnait des ailes afin de survoler ce redoutable tracé – les 1 000 kilomètres du Ring, en compagnie de Jo Bonnier. 

Spa, Ring,  Le Mans : le sympathique Californien ne s’était pas trompé de portes de sortie. Il aura laissé une « super » image. 

GP de l’ACF 1963
Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Retour à l’ACF 63 

Les monoplaces sont en place 

Le pouls des pilotes et de pas mal de spectateurs frôlent sans doute la zone rouge.   

GP de l’ACF 1963
Départ – Reims 1963 (c) Professeur Reimsparing

Départ ! 

Cette fois encore, Toto a réussi à éviter la meute. Il est vrai qu’il excelle dans cet exercice, parfaitement maîtrisé depuis des temps quasiment immémoriaux.. 

Fin d’une époque 

Jim Clark allait demeurer en tête d’un bout à l’autre grâce notamment à sa maîtrise d’une piste rendue humide par une pluie tardive qui lui permettra de compenser une perte de puissance de son moteur indépendante de sa volonté. Mais pas seulement.  

Il révèlera ultérieurement que lors des derniers essais, il avait définitivement mis au point les trajectoires idéales dans la succession des courbes du « premier secteur » (comme l’on dirait de nos jours), le plus exigeant, à savoir la courbe Musso, la courbe Annie-Bousquet et le gauche précédant le virage de Muizon ; et qu’il avait décidé de tout donner dès le départ, afin de creuser immédiatement le plus grand écart possible, histoire d’affirmer sa supériorité (sa modestie naturelle dût-elle en souffrir). 

La mission sera brillamment  accomplie. Une photo non publiée témoigne clairement du fait qu’il aborda ce même virage de Muizon, après moins d’un demi-tour, donc, fort d’une incroyable avance sur ses « poursuivants » (?), dont  témoigna son débouché solitaire du petit bois qui précédait la descente vers le Thillois : au point que, de loin, on se demanda si  un méga-crash n’était pas survenu derrière lui ! 

Souvenir impérissable.   

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