La minia-chronique de Classic Courses se penche cette fois sur une icône de l’histoire de la course et du rallye en particulier : la Lancia Stratos. Du déjà vu ? Pas forcément, car il s’agit cette fois de la toute première version vue en course de cette voiture légendaire.
Olivier Favre
Stratos ! Un nom qui fleure bon le rallye des années 70 et qui rappelle à nombre d’entre nous des pilotes fameux : Munari, Darniche, Andruet, … Et un modèle que les fabricants de miniatures ont reproduit à tour de bras depuis 50 ans. On se souvient notamment des deux reproductions de Solido, contemporaines des grands succès de la voiture échelle 1. Plus récemment, les usines chinoises n’ont pas été en reste. En particulier chez Spark, qui cette fois remonte aux origines en reproduisant la toute première Stratos vue en course, le prototype du Tour de Corse 1972.
Des protos en Corse
Commençons par un bref rappel historique. En 1972 le championnat du monde des rallyes est sur le point de naître. Mais pour l’heure c’est encore un championnat dit « international » qui réunit une petite dizaine de rallyes, du Monte-Carlo en janvier au RAC en décembre. Les autres épreuves font bande à part et peuvent donc se permettre un règlement plus libéral. C’est le cas du Tour de Corse qui accepte les prototypes du groupe 5. En 1972 cette liberté tombe à pic. En effet, plusieurs constructeurs désirent tester une nouvelle monture sur les lacets de l’île de Beauté. Il y a là Porsche avec deux nouvelles Carrera RS, Ford avec l’éphémère GT70, Simca-CG avec un spider MC, Ligier avec deux JS2 et Lancia avec la Stratos. Même Alpine profite de cette épreuve pour engager deux berlinettes évoluées relevant du groupe 5, pour Andruet et Darniche.
Voilà qui devrait garantir du beau spectacle aux insulaires en ce début de novembre. Sauf que ces prototypes sont pour la plupart très jeunes. Ils vont donc disparaître les uns après les autres, certains même très tôt. Soit sur sortie de route (la Ligier de Piot, la Carrera de Waldegård), soit sur panne mécanique (la Ligier de Ragnotti, la Carrera de Larrousse, la GT70 de Chasseuil et la Stratos). Seul le spider Simca-CG de Fiorentino sera en mesure de répliquer durablement à l’armada Alpine. A l’arrivée, l’équipage Andruet-« Biche » s’impose et la marque de Dieppe truste cinq des six premières places. Fiorentino s’intercale sur la deuxième marche du podium.
Une Stratos débutante
En cet automne 1972, on navigue à vue chez Lancia. La Stratos n’est qu’au début de son développement et Fiat n’a même pas encore donné son accord à la fourniture des V6 Dino Ferrari. Or, ceux-ci sont nécessaires à la construction des 500 exemplaires requis pour l’homologation en groupe 4 (1). Aussi, pour cette première apparition en course, personne ne s’attend à des miracles. Quand Sandro Munari abandonne après environ 130 km, suite au bris d’un arbre de roue, ce n’est donc pas une surprise. L’équipe de Cesare Fiorio va d’ailleurs prolonger sa présence sur l’île par une séance d’essais intensifs au lendemain de l’arrivée. L’hiver sera studieux également et la nouvelle bête de rallyes ne tardera pas à afficher ses prétentions l’année suivante. Première victoire en avril au rallye Firestone en Espagne, puis 2e place à la Targa Florio et victoire au Tour de France.
Qu’en est-il de la miniature ? Il était permis d’être méfiant à son égard. En effet, Spark a déjà produit plusieurs Stratos, dont certaines n’étaient pas exemptes de critiques quant au respect des formes. Mais celle-ci paraît a priori bien traitée, avec notamment la prise d’air moteur caractéristique de cette version proto. Tout juste peut-on regretter que les phares additionnels devant la calandre soient implantés un peu trop bas. Quant au capot avant, Spark y a installé une grille qui n’est pas forcément apocryphe, mais qui ne laisse pas apparaître la roue de secours. Celle-ci est pourtant bien visible sur la plupart des photos de la course. Ce capot « troué » aurait permis d’avoir une version originale, différente des autres Stratos. Dommage car cette roue de secours était bien apparente sur la version de présérie divulguée par Spark il y a quelques mois.
Plateau corse
Avant de poser cette Stratos « fumeuse » dans une vitrine, il faudra comme d’habitude compléter sa décoration soi-même avec les lettres « arlbor » à coller entre le M et le o. Et certains auront peut-être l’idée de rassembler autour d’elle les principales autres participantes de ce Tour de Corse 1972. Certaines sont disponibles en tout monté. AInsi, chez Trofeu il y a les Alpine d’Andruet et Darniche et la Capri de Vinatier victorieuse en groupe 2. Chez Altaya on peut trouver le spider Simca-CG et chez Minichamps les Carrera. D’autres nécessiteront soit de partir d’une base existante (les JS2 de Spark), soit de se mettre en quête d’un kit sorti jadis (la Ford GT70 chez Graphyland, les Peugeot 304 Groupe 2 chez Mini Racing). Une belle façon de rappeler les plateaux variés et colorés de cette première moitié des années 70, qui fut peut-être la plus belle époque des rallyes.
NOTE :
(1) Chez Fiat on n’était guère enthousiasmé par la perspective de voir naître au sein du groupe une concurrente sérieuse pour la 124 Abarth. Celle-ci s’était déjà fait brûler la politesse pour le titre international 1972 par la vieille Fulvia et on espérait bien qu’elle aurait la voie libre les années suivantes. Pourtant, le 14 décembre 1972 Fiat donnera son accord et Ferrari pourra donc livrer les V6 Dino à Lancia.