Les regards balayent d’abord la salle, les mûrs, les portraits, les gens. Coups d’œil furtifs entre initiés. Appréciation entendue d’un hochement de tête. Ils sont là pour ça. La connivence se sent. Cette très masculine assemblée a de quoi se divertir les sens. Cadre somptueux. Organisation parfaite. De celle qui vous font vous sentir à l’aise, même si les têtes connues que vous croisez ne connaissent pas toujours pas la vôtre, loin s’en faut. Telle était l’ambiance du 12e concours photo Glasurit.
Olivier Rogar
Glasurit 2017 : Le chemin et le but
L’ancienne est en vogue. Source de satisfaction et de plaisir quel que soit son type, son âge, sa destination et le genre d’intérêt qu’on lui porte. De la ballade familiale au Mans Classic, nous rappelle Patrick Peter, invité d’honneur de cette manifestation, le passionné partage le goût du chemin parcouru plus que du but qu’il faut atteindre. A l’inverse de celui qui ne voit dans l’automobile qu’un objet usuel, de déplacement…ou de placement.
Glasurit en communiquant via la voiture ancienne suit le chemin de cette passion ; Reconnaissance des constructeurs, des professionnels et des propriétaires. Rendons – nous compte : un nuancier de 600 000 couleurs… Un monde inconnu pour quelqu’un ayant du mal à distinguer le gris du bleu ou du vert ! Mais un miracle pour le possesseur d’un ancêtre dont le constructeur a depuis longtemps disparu.
Monaco Historique
Cette année le théâtre des opérations s’était porté à Monaco pendant le Grand Prix Historique. Du moins pour les participants au désormais fameux concours photos Une belle source d’inspiration. Lâchés dans les stands et autour du circuit, les photographes ont certainement eu du mal à se focaliser sur un choix tant les sujets d’action et les scènes d’inaction sont multiples sous cette belle lumière méditerranéenne.
C’est le mouvement qui a séduit le jury composé de professionnels du journalisme. Les élus ont tous choisi la monoplace d’avant 1965 – F1 et Formule Junior – et la piste pour s’exprimer . Le Lauréat est Toma de Saulieu avec un groupe de F1 des années 1961 à 1965. Le second est Antoine Pascal avec une superbe Bandini 1959 de Formule Junior et le troisième Stéphane Morsli avec une photo couleur sur fond noir et blanc de la Brabham BT3 de 1962. Nous imaginons pourtant le dilemme des jurés et la difficulté à choisir, comparer, classer ces prises de vue talentueuses. Ce qui ne veut pas dire qu’on aurait fait les mêmes choix. Mais telle est la dure loi des concours.
A ce sujet, une discussion entre Dominique Pascal des Editions Hommell et Christian Bedeï, photographe plusieurs fois récompensé ici, soulignait la difficulté à départager les candidats depuis l’avènement du digital. Les multiples possibilités de correction et d’amélioration des images privilégiant le travail sur ordinateur au travail sur le terrain. Evolution particulièrement sensible chez ceux qui n’ont jamais pratiqué l’argentique. La solution doit elle être radicale et « Classic » ? Donner une pellicule diapo 24*36 aux candidats et leur enlever toute possibilité « photoshop », comme le suggérait Dominique Pascal ? Assurément une source de réflexion.
Portraits
Comme souvent, le lieu créée la mise en abîme. Les photographes exposaient au milieu des portraits de stars. Et de pilotes. Rosberg, Prost et Schumacher observaient la remise des prix depuis leurs cadres noirs et blancs. Chacun avec sa pose, sa personnalité. C’est le caractère propre au travail des studios Harcourt. De chaque portrait semble émaner le vrai personnage qui se dissimule sous les habits de la star.
Un jour peut – être faudra-t-il aussi se faire tirer le portrait. Comme les quelques personnes auxquelles cette possibilité fut offerte au cours de la soirée. Salon de maquillage. Maquilleuse professionnelle. De quoi cacher quelques rayures ou raviver une peinture ternie. La photo capturera l’instant. Et laissera à la postérité cette image de la vie d’un homme. Ou d’un femme. Loin du module capable d’être admiré en déplacement ou à l’arrêt, du trajet au but, ce portrait est une étincelle de vie.
D’ailleurs cette assemblée d’amateurs éclairés ne s’y trompe pas. Vous interrogeant à voix basse. « L’avez-vous vu ? », « ? », « ….en bas ?», vous vous trouvez redescendant l’escalier qui conduit vers un rez-de-chaussée prenant soudain la dimension d’une destination inavouable. Allant jusqu’à snober la belle Carole Bouquet dont le portrait scrutateur n’a pas suffi à stopper ce flot qui vous entraîne vers une salle faite pour attendre. Concept très différent d’une simple salle d’attente. Toujours la même sage philosophie du voyage et du but. Dans cette salle donc, vide et silencieuse, on tombe sous le coup d’oeil contemplatif ou rêveur d’une troublante Laetitia Casta. Que faire alors sinon s’éclipser, songeur, par les rues désertes d’un Paris ayant aussi du mal à respirer ?…
Illustrations
1 © Christine Arnal
4 © Toma de Saulieu
5 © Antoine Pascal
6 © Stéphane Morsli
2,3,7,8 © Olivier Rogar
9 © Studios Harcourt