« Dis, Grand Pa, Rosberg c’est le meilleur pilote du monde ?
– Il est très fort, c’est sûr, mais de là à dire qu’il est le meilleur du monde…
– Mais il a gagné dimanche ! Et la course d’avant, c’est lui qui l’avait gagnée aussi !
– Oui Roman, il avait déjà gagné en Australie.
– Alors j’ai raison. C’est le meilleur du monde !
– On peut dire que dimanche, oui, c’était le meilleur du monde. Mais ça ne sera pas toujours aussi bien pour lui…
– Mais le dimanche d’avant aussi.
– Oui, c’est vrai. Et celui d’avant aussi.
– Aussi ?
– La saison dernière il avait gagné les trois derniers Grands Prix et maintenant il a gagné les deux premiers de la nouvelle saison.
Ça fait cinq fois de suite qu’il gagne ! Il n’a rien laissé aux autres. Mais c’est pas une preuve qu’il gagnera encore dans deux semaines.
– Ça sera où, dans deux semaines ?
– En Chine.
– Qui avait gagné en Chine l’année dernière ?
– Hamilton.
– Ah ? Et Rosberg il avait fait quoi ?
– Deuxième.
– Ah ? Eh bien moi je dis que cette fois c’est lui qui va gagner. Parce que c’est lui le meilleur ! »
Johnny RIVES.
Le grand Prix de Bahrein n’a déçu que les téléspectateurs pour qui un Grand Prix n’a de valeur que s’il donne lieu à une bataille sauvage pour la victoire. Quand un pilote domine de bout en bout, la plupart s’ennuient. Il y avait pourtant beaucoup à voir dimanche à Bahrein malgré la jolie domination de Rosberg. Ne serait-ce d’abord que sa course parfaite, immaculée, sans l’ombre d’une erreur – à l’exception d’un changement de pneus manqué qui n’est pas de son fait.
Contrairement à l’Australie, tout ou presque s’est joué au départ. Un départ que les Mercedes avaient manqué à Melbourne au profit des Ferrari. Mais la Scuderia n’avait pas su en tirer avantage. A Bahrein, Rosberg a parfaitement réussi le sien. Mais une fois encore cela n’a pas été le cas d’Hamilton. Et il l’a payé cher puisqu’il a dû au final se contenter de la 3e place derrière Rosberg et Raïkkonen, ce qui est un piètre résultat pour un champion du monde…
Or, tout changé qu’il apparaît désormais, Lewis a pris la chose avec un détachement surprenant. Mieux : avec le sourire. Celui du héros qui a gagné des tas de combats précédemment. Et qui sait qu’il en gagnera d’autres. « C’est la vie », aurait-il pu dire en empruntant une citation française que beaucoup d’Anglais adorent utiliser. Pour cette raison on a apprécié Hamilton autant que Rosberg qui a eu le triomphe modeste, dimanche à Bahrein.
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FERRARI : ENCORE MANQUÉ !
Quant à la Scuderia, elle a une nouvelle fois manqué le coche. Une sur deux seulement à l’arrivée, comme à Melbourne. Et de nouveau pour un problème de moteur. En Australie cela avait privé Raïkkonen de la quatrième place. Qui sait si à Bahrein cela n’a pas coûté la victoire à Vettel ? En tout cas ces deux incidents graves de moteur entrainent une incertitude terrible sur les chances dont Ferrari semblait disposer à l’orée de la saison pour battre les Mercedes. On n’était pas certains, avant le coup d’envoi du championnat, que les Ferrari auraient les performances pour contrer les Mercedes. Il apparaît après deux épreuves qu’en course en tout cas – en qualif ça n’est pas encore le cas – elles sont capables de rivaliser avec les allemandes. Mais là où le bat blesse terriblement, c’est en fiabilité. A la surprise générale pourrait-on ajouter. Celles des téléspectateurs que nous sommes, probablement celle des tifosi également en Italie. Et peut-être même à la surprise des responsables de Ferrari ! La jolie deuxième place de Raïkkonen n’y change rien. Kimi a accompli à Bahrein un probant sans faute. Il s’est constamment maintenu en position menaçante pour Rosberg, Mais cela n’apporte aucune garantie pour le G.P. de Chine. Aucune. En Italie, chacun doit retenir son souffle !
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DE VALEUREUX SECONDS RÔLES.
En ce qui concerne les meilleurs seconds rôles, très peu de changements par rapport à l’Australie. Une fois encore Daniel Ricciardo tire impeccablement son épingle du jeu au volant d’une Red Bull dont le déficit moteur est moins sensible que l’année dernière – même s’il reste encore assez perceptible. Une fois encore Romain Grosjean prouve qu’il a sacrément pris de la bouteille en accomplissant une performance sérieuse et convaincante. Et en la commentant avec une réserve de bon aloi. Derrière Ricciardo et Grosjean, les rôles ont été inversés entre Williams et Toro Rosso.
L’écurie Williams semble avoir manqué d’agressivité dans l’utilisation des Pirelli dont elle disposait. De plus elle a payé très cher la pénalité qui a été infligée à Vallteri Bottas. Une pénalité plus que sévère. Car que pouvait-il faire, le pauvre Bottas, dans le premier virage quand Hamilton lui a braqué sous le nez ? Lewis a agi comme s’ils avaient été seuls en piste, Rosberg et lui, sans même se soucier que toute une meute était lancée à leurs trousses. D’ailleurs, après coup, il n’a pas dit un mot sur l’incident ce qui aurait sans doute été bien différent s’il s’avait estimé être agressé.
Chez Toro Rosso, Max Verstappen a montré un visage bien plus convaincant qu’à Melbourne. Débarrassé de son équipier Sainz, victime des bousculades du premier tour, il a fait face à l’adversité avec talent et conviction. Il a notamment réglé au passage un fameux compte à Danil Kvyat qu’il a devancé au prix d’un freinage superbe que le jeune Russe aura du mal à oublier.
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STOFFEL VANDOORNE ET PASCAL WERLHEIN.
Voilà deux nouveaux noms à retenir pour ceux qui cherchent à lire dans l’avenir. Malgré la modestie de sa F1, Pascal Werlhein aura rejoint, en deux Grands Prix seulement, celui des meilleurs espoirs de la spécialité que sont Verstappen et Sainz pour les plus jeunes, auxquels on ajoutera Grosjean et Hulkenberg qui ont sans doute plus de bouteille mais à qui il reste encore à confirmer. Werlhein est bien l’une des deux grandes révélations de ce début de saison. Même s’il s’est contenté d’un résultat modeste (mais il ne dispose que d’une Manor) il a fait preuve, pour laisser derrière lui quelques F1 plus compétitives que la sienne, d’une combativité exceptionnelle. Tout en maitrisant des pulsions qui auraient pu le pousser à la faute quand certains pilotes – Ericsson en particulier – utilisaient les méthodes les plus déplaisantes pour le maintenir derrière eux.
Stoffel Vandoorne est la seconde grande révélation de ce début de saison, cela n’a pu échapper à personne. Le fait qu’il ait devancé son champion du monde d’équipier (Button) dès les qualifs lui a valu d’être porté au pinacle d’entrée de jeu. A juste titre. Quant on pense que dans l’avion qui le conduisait du Japon à Bahrein il s’efforçait d’apprendre l’utilisation complexe du tableau de bord truffant le volant de la McLaren avec laquelle il allait remplacer au pied levé Fernando Alonso… En course, il a superbement tenu ses promesses au terme d’un effort constant et sérieux. Récompensé par son premier point en F1. Il en marquera d’autres.
On n’achèvera pas ce post scriptum honorant les meilleurs espoirs sans un mot pour Kevin Magnussen, auteur d’une course exemplaire sur une Renault perfectible. Mais qui, entre ses mains, a devancé au bout du compte les Force India et les Sauber – ce qui n’est tout de même pas rien…