Vous êtes l’heureux propriétaire d’une ancienne et vous désirez découvrir l’une des plus belles régions de France au volant de votre belle ? Ce qui suit va forcément vous intéresser : un partenariat inédit a été signé jeudi 4 avril entre la Dordogne et la Corrèze pour favoriser l’organisation de manifestations et de rassemblements de voitures anciennes. Classic Courses y était.
Pierre Ménard
Les magnifiques jardins d’Eyrignac en Dordogne (1) ont servi de cadre à une signature qui fera date dans les tribulations des anciennes en France : la présidente de Dordogne Périgord Tourisme, Sylvie Chevalier, et le président de Corrèze Tourisme, Jean-Claude Leygnac, ont signé un accord Dordogne-Corrèze prévoyant une mutualisation totale des moyens des deux départements dans l’organisation de manifestations de véhicule anciens et historiques courant sur 2019 et 2020. Une grande première en France ! Malgré un ciel chargé, le soleil brillait dans les cœurs de tous les participants à cette belle journée, tant l’événement était d’importance.
Les organisateurs ont mis les petits plats dans les grands en ce jeudi de début avril : nous avons rendez-vous à la gare désaffectée Robert Doisneau de Carlux, dans la vallée de la Dordogne. Cette gare autrefois sise sur la ligne départementale Bordeaux-Sarlat-Aurillac (désormais coulée verte) a été transformée en 2018 en musée dédié à la photographie (2). En ce matin froid et humide (cinq jours auparavant, on bronzait en t-shirt sous un soleil de fin mai !), le parking de la gare est occupé par une vingtaine de superbes autos allant des avant-guerre à quelques récentes youngtimers. Les membres des clubs locaux ont en effet été sollicités pour emmener dans leurs belles VIP et gens de la presse vers le manoir d’Eyrignac et ses jardins tant célébrés, situés à un quart d’heure de là.
Chacun ayant le loisir de choisir son carrosse, j’opte pour une rutilante Hotchkiss 617 verte de 1935, n’ayant jamais posé mon séant sur les fauteuils d’un tel modèle. Voiture très surprenante pour un néophyte des véhicules des années trente comme ma pomme par son freinage solide, ses reprises plus que correctes à bas régime en quatrième (les vertus du gros six-cylindres) et sa tenue de route irréprochable pour une auto de plus de quatre-vingt balais ! Notre petit cortège traverse quelques beaux villages, salué par des habitants apparemment conquis (qui a dit que les Français n’aimaient pas l’automobile ?) pour atteindre ces fameux jardins où vont être apposées au bas d’une convention les signatures les plus importantes du moment pour la bonne santé du tourisme en voiture ancienne.
Une fois les vaillantes mécaniques bien rangées sur l’esplanade, nous sommes conviés à l’intérieur pour quelques explications avant l’acte solennel. A l’origine de ce jumelage, un long travail réparti sur huit ans par deux personnalités incontournables, Jean-Paul Brunerie et Nicolas Mignard. Le premier, infatigable ambassadeur du Limousin automobile bien connu de Classic Courses, contacta dès 2011 le second, qui était alors en charge de l’ADRT Corrèze (Association pour le Développement Régional du Tourisme), pour le convaincre de favoriser l’essor des manifestations d’automobiles anciennes dans le département. L’intérêt économique était évident : une clientèle plutôt haut-de-gamme qui ferait marcher hôtellerie et restauration locale, sans parler de tous les commerces annexes.
Séduit, Mignard donna son accord à Brunerie qui put présenter une première brochure lors de l’édition 2013 de Rétromobile. Le projet trouva vite son public grâce à un énorme travail de communication. En 2017, la refonte des nouvelles régions changea pourtant la donne et la Corrèze se retrouva un peu seule dans sa volonté de tourisme mécanique. Il fallut trouver de nouveaux partenaires et c’est d’une voisine de cette Nouvelle Aquitaine que vint le salut : la Dordogne et ses richesses furent intéressées par le projet. Deux ans plus tard, un partenariat était trouvé et débouchait sur cette journée du 4 avril aux jardins d’Eyrignac.
Cette signature peut évidemment faire espérer de nouvelles ouvertures : les deux partenaires envisagent de trouver d’autres micromarchés avec certains départements. Les retombées directes des opérations concoctées sur la Corrèze ont rapporté plus de 500 000 euros depuis 2014 ! On estime à l’équivalent en retombées indirectes, sans compter les possesseurs d’anciennes qui s’organisent leurs propres circuits en « freelance », en ayant bien entendu pris la brochure auparavant. Plus de 30 clubs et 1500 personnes ont déjà été accueillis.
A titre d’information, l’année 2019 prévoit un rallye de motos Indian de l’entre-deux guerres en mai, l’Assemblée Générale de l’Amicale Spitfire en juin, les fameux Cobras Days fin juin où une cinquantaine de ces autos mythiques font une halte vrombissante dans certains des plus beaux villages de la région, le deuxième rallye des Bugatti Brescia en septembre après le succès de l’année dernière, ou encore un rallye Morgan en septembre également. Et bien sûr, tous les programmes concoctés par l’association Corrèze-Dordogne-Périgord pour découvrir dans les meilleures conditions une région où le bien vivre n’est pas une vaine expression. Programmes que vous pourrez trouver sur la brochure jointe : https://www.perigordreservation.com/IMG/pdf/brochurevehiculesanciens-19-24.pdf
Notes
(1) A Salignac-Eyvigues (24590), https://www.eyrignac.com/
(2) En août 1937, l’ouvrier de chez Renault employé au titre de « photographe industriel » Robert Doisneau découvre cette gare lors de ses congés payés qui l’amènent en Dordogne. Il tombe amoureux de la région et y reviendra régulièrement jusqu’à sa mort. On admirera dans ce musée plus d’une centaine de clichés du Périgord que le célèbre photographe a pris au fil des ans, ainsi que des expositions temporaires. Les fanatiques de l’argentique pourront s’initier, ou se perfectionner, avec cette technique qui perdure fort heureusement à l’heure du numérique https://www.lagare-robertdoisneau.com/.