9 janvier 2019

DNF 2018

Perpétuant une tradition désormais bien établie, je vous propose en ce début d’année de saluer la mémoire de quelques figures du sport auto qui ont tiré leur révérence en 2018 : les DNF (did not finish) 2018.

Olivier Favre

Cette année encore, les patrons d’écurie ont été plusieurs à quitter définitivement les affaires :

  • Martin Birrane : homme d’affaires et ancien pilote irlandais (9 participations au Mans). Il fut aussi le propriétaire de Lola lors des 15 dernières années de la firme, jusqu’en 2012.
  • Pier Luigi Corbari : ancien dirigeant d’Autodelta avec Carlo Chiti, puis directeur sportif en F1, de Brabham-Alfa et d’Alfa puis d’Eurobrun en 1989-90.
  • Rüdi Eggenberger : ce Suisse fit les beaux jours du Championnat d’Europe des voitures de tourisme dans les années 80 en engageant des BMW, puis des Volvo. Le team Eggenberger gagnera ensuite en 1987 l’unique édition du championnat du monde des voitures de tourisme – Groupe A, avec des Ford Sierra.
DNF 2018

Pier Luigi Corbari et Rüdi Eggenberger – © DR

  • Dave Maraj : propriétaire de la plus grande concession Porsche du monde en Floride, mais aussi patron du team Champion USA qui décrocha plusieurs victoires en endurance de 2005 à 2008. Avec bien sûr comme point d’orgue la victoire au 24 Heures du Mans 2005 avec l’Audi de Kristensen-Lehto-Werner.
  • Mo Nunn : d’abord pilote de F3 à la fin des années 60, il devient constructeur et lance sa marque Ensign dans le grand bain de la F1 en 1973. Nous vous en avions parlé ici : Note CC – Grand Prix de France 1973. Après dix ans de galères financières au cours desquels il donne leur chance à plusieurs jeunes pilotes dont Nelson Piquet et Patrick Tambay, il abandonne la F1 et devient ingénieur en Formule Indy. Il y connaît enfin le succès, d’abord avec la victoire de Fittipaldi à Indy en 1989, puis surtout à la fin des années 90, avec notamment quatre titres consécutifs en CART.
DNF 2018

Mo Nunn (avec Clay Regazzoni) – © DR

  • Don Panoz : homme d’affaires américain ayant fait fortune dans l’industrie pharmaceutique. Il s’est lancé ensuite dans le sport auto en créant sa marque et en mettant sur pieds l’American Le Mans Series. Difficile d’oublier la gueule (et le bruit !) de ses autos vues régulièrement au Mans, en particulier l’Esperante GTR d’il y a 20 ans.
  • Gérard Welter (photo d’ouverture) : désigner de métier chez Peugeot dont les voitures (la 205 en particulier) lui doivent beaucoup, il créa avec Michel Meunier la marque WM, que l’on vit au Mans pendant près de 15 ans. C’est une WM qui détient le record absolu de vitesse dans les Hunaudières, définitivement fixé à 405 km/h en 1988.
Cet article qui pourrait vous intéresser :  Grand Prix d'Abu Dhabi 2018, COURONNEMENT SUPRÊME D’HAMILTON

Puisqu’il est question de Hunaudières, continuons avec ceux qui ont participé à l’épopée des 24 Heures du Mans en mentionnant les disparitions, par ordre alphabétique :

  • du comte Riccardo Agusta, héritier de la fameuse firme italienne produisant des hélicoptères et des motos. Il participa six fois de suite à la classique mancelle entre 1993 et 1998.
  • de Michel de Bourbon, prince de Parme, engagé au Mans en 1964 (René Bonnet) et 66 (Ferrari 275 GTB), après avoir participé à la libération de la France dans les rangs de l’armée américaine.
  • de Max Cohen Olivar, pilote privé marocain qui fut un pilier de l’épreuve sarthoise pendant 30 ans (20 participations entre 1971 et 2001).
  • de Marcel Martin, qui fut directeur de course au Mans pendant 20 ans jusqu’en 2000, après avoir pris part à l’épreuve deux fois : en 1967 (Abarth) et 68 (Fiat Dino).
  • de Teodoro Zeccoli, huit participations entre 1961 et 1974. Ses initiales étaient parfaitement appropriées pour un pilote dont la carrière fut si étroitement liée à Alfa Romeo.
DNF 2018

De A comme Agusta à Z comme Zeccoli – © DR

Rappelons également la disparition en début d’année de Dan Gurney, qui fut bien plus qu’un vainqueur du Mans et dont le parcours fut salué sur Classic Courses par Pierre Ménard : Note CC – Hommage à Dan Gurney.

Le grand Dan nous fournissant le lien avec les monoplaces, signalons également le décès de :

  • John Miles, dont le nom est associé à Lotus. Excellent ingénieur, il était affecté à la mise au point des créations de Colin Chapman, y compris les ratages comme la F1 à 4 roues motrices de 1969 que Rindt et Hill refusaient de piloter. Quittant Lotus après la mort de Rindt, il est engagé par BRM pour deux apparitions hors championnat en 1971. Puis il termine sa carrière de pilote avec des voitures de tourisme (victoire aux 6 Heures Paul Ricard 1972 avec Brian Muir sur Capri). Il continuera à exercer ses talents d’ingénieur chez Lotus puis chez Aston Martin où il mettra au point notamment la DB7.
  • Harry Stiller : double champion d’Angleterre de F3 en 66 et 67, il est également connu comme patron d’écurie dans la décennie suivante. Il a notamment permis à Alan Jones de débuter en F1 en 1975, au volant d’une Hesketh 308.
  • Dave Morgan, qui fit une apparition en F1, au Grand Prix d’Angleterre 1975 (Surtees – abandon). Mais son haut fait fut une victoire surprise à Mallory Park en 1972 avec sa Brabham, en ouverture du championnat d’Europe de F2.
DNF 2018

John Miles et Dave Morgan – © DR

Toujours chez les Britons, c’est un personnage haut en couleurs qui a tiré sa révérence : Barrie « Whizzo » Williams, spécialiste des « Touring cars », puis grande figure des meetings historiques qui disputa près de 800 courses au long d’une carrière de 60 ans.

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Du côté des championnats français, on compte parmi les DNF 2018 :

  • Jean Lachaud, animateur des courses de côte françaises au début des seventies.
  • Jean-Pierre Gabreau, vainqueur de la coupe R12 Gordini en 1973, puis animateur du championnat de France de producton et concurrent régulier des premières éditions du Paris-Dakar.
  • André Bourdon, spécialiste des coupes monotypes : quatre titres nationaux entre 1977 et 1988 (Renault 5, Peugeot 505 et 309, Porsche 944 Turbo).
  • Jean-Michel Neyrial, 2e du Volant Elf 1978 et vice-champion de France de Formule 3 en 1981.
DNF 2018

André Bourdon – © DR

Restons en France pour regretter que l’épopée Matra ait encore perdu plusieurs de ses acteurs majeurs :

  • Bernard Boyer, ingénieur autodidacte (il avait juste un CAP de mécanicien), il est recruté par Matra après ses premères expériences chez CD et Alpine (2 participations au Mans comme pilote). Spécialiste des châssis, il fut un homme-clé dans les succès des monoplaces et des protos 650 et 670.
  • Jean-François Robin, motoriste qui eut le talent et le privilège de travailler sur les deux moteurs de course français les plus glorieux : le V12 Matra, puis, dans les années 90, le V10 Renault.
  • Michel Polard, technicien qui fut des tout débuts de l’aventure Matra Sports.

Passons au rallye pour saluer la mémoire de :

  • Pierre Orsini, l’insulaire qui s’imposa trois fois au Tour de Corse (1959, 62, 65) avec des Renault Dauphine et 8 Gordini.
  • Ake Andersson, qui gagna son rallye de Suède en 1966 (Saab), puis fut brièvement pilote officiel Porsche au début des années 70 (4e du Monte-Carlo 1970 sur 911 S).

    DNF 2018

    Pierre Orsini @ DR

Outre-Atlantique, il convient d’évoquer plusieurs DNF 2018, à commencer par un monument :

  • David « Silver Fox » Pearson, grand nom du championnat NASCAR (105 victoires et trois titres en 1966, 68 et 69) et l’un des plus farouches opposants au « King » Richard Petty. Nul doute que beaucoup d’Américains de plus de 50 ans se souviennent encore de l’épique bataille entre les deux hommes dans le dernier tour des 500 Miles de Daytona 1976 et de la « carambolesque » arrivée qui en résulta.
  • Ron Grable, pilote polyvalent que l’on vit surtout en Formule A (la F5000 américaine), dont il décrocha le titre de champion SCCA en 1968.
  • Craig Fisher : ce Canadien se distingua surtout en catégorie Tourisme, au point d’être remarqué par Roger Penske, qui l’associa à Mark Donohue au volant de Chevrolet Camaro (3e place aux 12 Heures de Sebring 1968).
  • Kitty O’Neil, un petit bout de femme (1,58 m – 44 kg) qui n’avait pas froid aux yeux. Surmontant sa surdité, elle se frotta à la plupart des sports dangereux et devint cascadeuse pour Hollywood. Puis elle s’attaqua aux records du monde de vitesse féminins sur terre et sur l’eau. En 1976 elle devint ainsi la femme la plus rapide du monde en établissant avec le SMI Motivator une marque qui tient toujours : 825 km/h.
  • Dee Ann Andretti, épouse de Mario et mère de Michael et Jeff.

 

DNF 2018

David Pearson et Kitty O’Neil – © DR

Notre panorama des DNF 2018 comprend également deux personnages sulfureux qui firent leur apparition en F1 à peu près au même moment. A cette époque, l’argent coulait à flots sur le grand cirque de Bernie, sans que son origine soit toujours très claire :

  • Akira Akagi : dirigeant de Leyton House, le consortium japonais qui racheta March à la fin des années 80 et qui fut ensuite englouti dans le scandale de la Fuji Bank.
  • Jean-Pierre Van Rossem, l’innénarrable patron de Moneytron, sponsor des Onyx de Mike Earle qui auraient sans doute mérité mieux.
DNF 2018

Akira Akagi et Jean-Pierre Van Rossem – © DR

Enfin, accordons aussi une pensée à ceux que j’appellerais les médiateurs du sport auto : photographes, journalistes, artistes, organisateurs, …ils sont l’indispensable lien entre les acteurs et le grand public. Eux non plus n’ont pas été oubliés par la Grande Faucheuse, qu’on en juge :

  • Ulrich Upietz, le photographe allemand très lié avec Porsche, également directeur de la maison d’édition Gruppe C Motorsport.
  • François Jolly, ancien secrétaire de l’AGACI et historien qui s’était notamment signalé par ses livres sur les marques françaises (DB, Delage, Delahaye).
  • Jess Pourret, auteur de la « bible » sur les Ferrari 250 GT de compétition.
  • Pierre Barbaza, journaliste et essayeur à Echappement, puis rédacteur en chef d’Auto-Passion.
  • Georges Taquet, ancien pilote puis directeur du circuit de Croix-en-Ternois dans le Pas-de-Calais.
  • Claude Viseur, plus connu sous le pseudonyme de Clovis, avait participé à ses débuts à l’aventure Michel Vaillant dans les studios Graton. C’était un personnage jovial que l’on croisait toujours avec plaisir au hasard des salons type Rétromobile.
DNF 2018

Clovis – © DR

Pour terminer, une dernière pensée pour deux sympathiques passionnés avec lesquels j’ai été en contact grâce à Internet :

  • Frank de Jong, un passionné néerlandais dont j’ai aidé à alimenter le site web devenu depuis LA référence sur l’histoire des courses de Tourisme : http://touringcarracing.net/
  • Gennaro Robustelli, un véritable artiste du 1/43 qui avait épaté le monde de la miniature il y a 40 ans avec ses transkits ultra-détaillés sur bases Solido.
Cet article qui pourrait vous intéresser :  « Veni, vidi, vici », Le Mans 1933. (*)

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