1989-1999 La réalisation d’un rêve
Il est des livres qui viennent chatouiller cette redoutable nostalgie qui parfois nous étreint. Ils racontent un lieu, des moments à jamais disparus. J’imagine une édition venant compiler 20 ans de souvenirs de photos et d’anecdotes sur SLC racontées par Jean-Marie Perrier, 40 ans de l’usine Matra de Romorantin, 5 ans du Palace de Fabrice Eamer, 10 ans de la Factory de Warhol, 40 ans du circuit de Reims-Gueux.
Jean-Paul Orjebin
Hervé Ogliastro et Laurent Hériou, ont décidé de partager le souvenir des 10 ans qu’aura vécu le Centre International de l’Automobile. Ils ont écrit un beau livre publié aux éditions Jamval. On y apprend beaucoup sur ce lieu aujourd’hui oublié alors qu’en son temps il était très couru. Nous comprendrons que finalement, il ne l’était suffisamment et que cela explique sa fermeture en 1999.

Tout avait démarré lors d’une rencontre entre Hervé Ogliastro et William Grünler le 11 septembre 1988. Certains s’en souviendront, le magazine Automobiles Classiques organisait ce jour-là son premier concours d’élégance au Parc de Bagatelle. William tout en félicitant Hervé et sa Bugatti 57 Atalante d’avoir gagné dans sa catégorie lui glisse à l’oreille un projet de musée automobile à Paris, d’un concept nouveau, il aimerait le voir entrer dans l’affaire.
Hevé sera conquis par l’idée maitresse qui taraude William Grünler, celle non pas de figer le musée avec des pièces acquises et donc nécessitant un apport financier important avant même l’ouverture, mais accueillir des expositions thématiques renouvelées fréquemment.
Les autos seraient prêtées par des collectionneurs, des constructeurs et d’autres musées. L’intérêt supplémentaire est d’inciter les visiteurs à revenir régulièrement et ainsi assurer une billetterie conséquente, Monsieur Grünler, homme de marketing international sait de quoi il parle en matière d’étude de marché et de cash -flow.
William trouve un local parfaitement adapté d’environ 10 000 m2, comble de chance il s’agit des anciens établissements Motobécane à Pantin, le lieu respire encore la mécanique.
Les auteurs qui ont vécu le CIA durant ses 10 ans de vie intense nous racontent sur 320 pages et plus de 700 photos et documents, cette aventure à travers histoires, anecdotes, discussions, difficultés, joies, surprises, rencontres extraordinaires etc… Nous sommes au cœur de la passion de ces collectionneurs qui ont tenté de partager, de transmettre leur amour du patrimoine automobile.
Des rencontres extraordinaires
Dès le départ il y a la rencontre avec Jean-Pierre Beltoise. Dans les années 80 il est la plaque tournante de tout ce qui touche à l’auto de course et de collection en France, il est de l’aventure et sera d’excellent conseil, ne parlons pas de son réseau. JPB sera avec Jean-Louis Ricci, André Lecoq, Michel Ferreri en plus de William Grünler et Hervé Ogliastro déjà nommés, du cercle des membres fondateurs.

REPRO COLLECTION CIA – PANTIN CENTRE INTERNATIONAL DE L’AUTOMOBILE
Il y aussi celle avec le Docteur Bonzelle, le médecin du Président Pompidou, il garde jalousement auprès de lui la « 1PR 75 », la DS présidentielle commandée par l’Elysée pour le Général de Gaulle. Lionel Gerard-Colbère, directeur du CIA réussira contre toute attente à convaincre le Docteur de prêter son joyau au musée, une première. D’autres anecdotes savoureuses autour du Docteur Bonzelle, elles sont dans le livre.
Le CIA réussira une rencontre au sommet pour un « Dîner des Quatre Grands » Raymond Levy pour Renault, Jacques Calvet pour PSA, Umberto Agnelli pour Fiat et Karl Hahn pour VAG, du beau linge à Pantin. Cet aréopage sera conduit de la Concorde à Pantin en voitures de collection et en 20mn malgré les embouteillages monstres d’un lundi à 18h30 grâce à l’aide des motards de la Garde Républicaine.



Des expos éphémères
Le principe est de renouveler en permanence les autos exposées afin que le musée soit vivant. Une de ces expos sera « Automobile et cinéma ». Là aussi le hasard des rencontres fait la moitié du boulot. Jean-François Rageys présente Bob Gathercole à Lionel, le directeur du CIA, le dialogue est savoureux :
- Dis-moi Bob tu pourrais m’aider pour une expo de voitures de Cinéma ?
- Of course my dear
- La Mustang de Bullit ?
- Easy
- La Cox de Disney ?
- No problem
- La De Lorean de Retour vers le futur ?
- Which version ?
Je passe, cela fait trois pages du bouquin, l’expo sera une réussite.


Une autre expo éphémère à l’initiative d’Adrien Maeght, celle des 100 ans d’affiches Automobiles. A faire pâlir notre ami Lauro Malavolti grand collectionneur de Modène. Avant le CIA l’expo sera passée par Montréal, Dallas, Detroit et Boston elle finira à la Fondation Gianadda, à Martigny en Suisse, avouez que Pantin se place pas mal au milieu de ces villes prestigieuses.

Les grands carrossiers
Nous vous laisserons découvrir les maîtres du design venus visiter l’expo que le CIA leur a consacrée mais nous ne résisterons pas à dévoiler cet extraordinaire document de Nuccio Bertone devant le master bois du coupé Alfa Giulietta 1954 installé sur le carrelage blanc du 25 rue d’Estienne d’Orves à Pantin. Un dialogue savoureux entre le maestro et l’auteur est à déguster sans modération.

PHOTO © BRUNO DES GAYETS/LAURENCE GODART
Les grands constructeurs
Notons-en trois parmi la kyrielle d’exposés, Facel Vega et le courrier de remerciement de Jean Daninos, d’une grande humilité, Lamborghini et bien sûr Matra en grande majesté avec ses pilotes jeunes, joyeux, victorieux. Quatre pages sont consacrés à Jean-Pierre Beltoise dont une belle pige d’Anthony.




Le CIA à travers la presse
Pour ce chapitre les auteurs ont confié deux pages à notre ami Jacques Vassal dont les articles dans Classic Courses sont d’une pertinence rare ; que n’ai-je pas recopié ses lignes plutôt que de vous infliger les miennes. Parmi les extraits des diverses parutions dans la presse des années 90 je retiens ce titre dans Automobiles Classique : « Paris vaut bien un Musée ».

Ils sont venus au CIA
Un florilège de photos est proposé en fin d’ouvrage. C’est émouvant et impressionnant de voir la quantité de personnalités passée au CIA pendant ses 10 années de vie, une superbe photo de Charles Pozzi devant la Delahaye avec laquelle il a disputé les 24h du Mans 1949 magnifie ce florilège.

Les deuxième et troisième de couverture recueillent les autographes des visiteurs célèbres, de Ron Dennis, Jean Todt, Patrick Tambay, Henri Pescarolo, Luigi Colani et d’autres tous prestigieux.
Nous vous en proposons deux, celle de Jean-Pierre Jaussaud et celle de Johnny Rives.


Pour avoir visité en son temps le CIA plusieurs fois, y avoir passé quelques soirées professionnelles, je n’imaginais pas que ce lieu magique puisse un jour fermer ses portes. Les auteurs nous font vivre la réalisation d’un rêve qui aura duré 10 ans. Dix années d’aventure passionnante avec un début, un climax et une fin expliquée, inexorable mais difficile à admettre par nos cœurs d’amoureux de l’automobile.
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Centre International de l’Automobile
Auteurs Hervé Ogliastro et Laurent Hériou
Editions JAMVAL – ISBM 978-2-9561122-5-9
Bruno des Gayets est l’auteur de certaines photos communiquées par l’éditeur, pour les personnes qui pourraient être intéressées, voici ses coordonnées :
BRUNO DES GAYETS
21 RUE MAUBLANC
75015 PARIS
Tél. : 33 (0)9 50 38 16 49
bdg@nikoja.com
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