Continuons notre saga Abarth. Au milieu des années 60 en se rapprochant de Fiat, ce petit constructeur put élargir sa gamme de produits commerciaux tout en visant désormais la victoire au scratch et non plus de catégorie avec des cylindrées de plus en plus élevées
Patrice Vergès
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Abarth n’était pas un personnage facile loin de là. Toujours très élégamment vêtu, il pouvait être aussi charmant que désagréable. Il se montrait très dur avec ses ingénieurs qu’il humiliait à travers un incompréhensible charabia italo-germanique tout en croquant des pommes stockées dans un panier toujours à ses cotés. Même traitement avec ses pilotes officiels qu’il insultait copieusement les traitants de « pauvre con » quand ils ne battaient pas le record du tour. Il les obligeait à essuyer leurs chaussures quand ils rentraient à bord ou à prendre beaucoup d’appui en virage afin que leur voiture lève la roue extérieure voire leur imposer une trajectoire contraire à la logique. Il les contraignait aussi à battre les records du tour même quand le besoin ne s’en faisait pas sentir car il recevait des primes de Fiat pour chaque record. Il les contraignait à piloter les vitres fermées pour ne pas détruire l’aérodynamique. Les Abarth généralement couleur Rosso racing décorées d’un énorme scorpion jaune étaient magnifiques et à défaut de rouler longtemps, avançaient comme des avions.
Trop de modèles
Courir chez Abarth, pour un bon pilote, c’était l’assurance de remporter sa catégorie et aussi de se faire remarquer par Ferrari même s’il piquait une grosse colère quand on déclarait que ses voitures rouges étaient les Ferrari du pauvre. Cela ne l’avait pas empêché de passer un accord moral avec le « Commendatore » pour ne jamais débaucher un pilote l’un chez l’autre.
A partir de 1967, Abarth qui employait alors plus de 350 personnes élargit encore ses activités. Trop certainement ce qui le mena à sa perte. A partir de la nouvelle gamme Fiat 850 et 124, il dériva des voitures de tourisme gonflées qui connurent un petit succès. Son cheval de bataille produit à 1200 exemplaires fut la minuscule Fiat 595/695 SS qui frisait les 140 km/h ! Il développa des prototypes plus ambitieux notamment la surprenante Berlinette 2000 OT au moteur en porte à faux d’où s’échappaient toujours d’énormes mégaphones suant la puissance et l’agressivité.
Après divers prototypes 2 litres 4 cylindres, Abarth produisit un proto V8 3 litres qui permit à l’Autrichien Ortner d’être sacré Champion d’Europe de la Montagne au début des années 70. Abarth s’enlisa dans de nombreuses voitures de tourisme et aussi trop de prototypes différents réalisés par l’excellent ingénieur Marco Collucci. Ces modèles font aujourd’hui la joie des historiens de la marque proposant selon les années, par exemple, plusieurs barquettes groupe 6 à moteur central ou en porte à faux. Abarth qui en avait assez de ne glaner que des victoires de classe rêvait de s’attaquer au championnat du monde des Sport Prototypes. Pour ce faire, il fit dessiner un colossal V12 de 6 litres de cylindrée délivrant plus de 600 ch. Mais, la FIA qui interdit dès 1968 les moteurs de plus de 3 litres en proto ruina son coûteux projet.
7400 victoires !
Les Abarth de tourisme trop chères et concurrencées par Fiat qui avait développé ses propres version sportives se vendaient mal pendant que le service course coûtait une petite fortune. En juillet 1971, après 7400 victoires glanées en 20 ans, la soixantaine passée, une certaine lassitude, des grèves épuisantes au sein de son entreprise et des problèmes de trésorerie poussèrent Abarth à céder dans de bonnes conditions son affaire à Fiat après avoir songé la vendre à Porsche puis au pilote Suisse Peter Schetty.
Le géant italien exploita son nom encore synonyme de performance pour qualifier ses versions sportives et de compétition. Son service course fut repris par son ingénieur Enzo Osella qui après avoir fait une longue incursion en Formule 1 dans les années 80/90 continua ses activités avec des protos très compétitifs uniquement destinés aux courses de côte. Si Abarth a disparu assez jeune en novembre 1979 victime d’un cancer, son nom est encore bien présent dans nos mémoires grâce à Fiat qui a su, plutôt bien que mal, le pérenniser.