Elon Musk met une Tesla en orbite autour de la terre. Paris en appelle désespérément aux balayeuses de la République. Et la neige donne de l’air à Rétromobile. De l’air et des courants d’air aussi, n’est-ce pas mesdames et messieurs les artistes ? Trois pavillons plus les démonstrations extérieures. On y respire mieux que ces dernières années et on se bouscule moins. Seuls les chiffres nous diront si nous devons ce confort à l’augmentation de surface ou à une variation de fréquentation. Marchands, Libraires, Clubs, Musées, Marques occupent l’espace avec leur talent habituel. Notre tour de piste est aussi partiel que partial. Entre coups de cœur et coups au cœur, doux rêves et dures réalités, nous restons dans les quatre temps de l’émotion. Comme de bonnes mécaniques toujours prêtes à monter dans les tours !
Olivier ROGAR
McLaren
Formidable exposition des machines de Bruce, conçues par Robin, Gordon ou Gordon (1). La M23 avec laquelle Emerson Fittipaldi a remporté son titre en 1974, aidé par Denny Hulme. La M8D CanAm qui nous a fait rêver en Solido (2) et qui a tout gagné ou presque en CanAm en 1969 et 1970 et la M7A aussi. Pour nous la plus belle F1 des années 60. Oui elle se dispute le titre avec l’Eagle du grand Dan Gurney, certes élégante mais moins fine. La M2B a lancé la série en 1966. C’était avant la formidable couleur papaye qui donne tant de personnalité à ces autos. Après être passées du rouge et blanc au gris puis au noir, les McLaren ont retrouvé leur couleur, en partie du moins, en 2017. Espérons qu’elles la conservent en 2018 et que le palmarès de l’écurie en reprenne lui aussi avec le moteur Renault. Enfin, avec le « Power Unit » devrions nous dire.
J’ai moins apprécié l’accès à ce magnifique stand. Cerbères à l’entrée. Impossible d’y pénétrer. « Je suis accrédité ! » « Oui mais pas par nous », « Je veux juste saluer le Monsieur en rouge que je connais », « Non », « Mais je ne vais pas vous piquer une montre », de guerre las j’ai suggéré que je pourrais peut-être l’appeler, « Oui il pourra venir mais vous ne pourrez pas entrer… » … J’ai fait la bise au Monsieur en rouge devant les cerbères en noir et lui ai donné rendez-vous le lendemain. Ailleurs… Richard, je ne doute pas que vous aimiez l’automobile et la course. Alors laissez son âme à Rétromobile. Ne le transformez pas en camp retranché pour VIP qui ne se mélangent pas !
Renault
Pas de McLaren ni de F1 sur le stand Renault. Mais une belle série d’Alpine A 442. Celles engagées au Mans 1978. Celle des vainqueurs, le regretté Didier Pironi et Jean-Pierre Jaussaud. Quarante ans. Ca me rappelle une discussion au Grand Prix Historique de Monaco il y a deux ans. Un responsable Porsche se complaisait à raconter à René Arnoux et Romain Dumas les déboires subis par Renault en 1976/1977 contre Porsche. Ayant vécu les choses de l’intérieur ses souvenirs étaient cruels pour Renault. Etant présent « légitimement », je lui demandai alors comment ça s’était passé pour Porsche en 1978. Après un coup d’œil perdu, presque hagard, il a ri, puis tourné les talons… Sourires…
Vous vous demandez sûrement ce que cette Colorale fait là. Rien. J’adore cette voiture et sa cousine la Prairie. Prairie qui servait de taxi dans mon village en Corse. Taxi parfois surchargé qui à l’instar de l’Aéropostale faisait « la ligne ». Entre le village et Ajaccio. « Vous Mademoiselle, vous monterez sur les genoux de Monsieur ». La proposition réellement honnête et courtoise du chauffeur, bien que totalement inappropriée fut accueillie comme il se doit par l’intéressée. Mais l’histoire est restée. Et faisait beaucoup rire ceux qui en avaient été témoins.
Fiskens
Fiskens se présentent comme le lieu où les plus grandes automobiles du monde sont présentées à la vente. « The place where the world’s greatest automobiles come to be sold ». Ils se situent entre le négoce, le courtage et la haute couture. Ils ne viennent pas simplement vendre des voitures, non, ils présentent leur collection Fiskens Printemps 2018. Subtile différence direz-vous. Pourtant tout est là. Ces autos exceptionnelles seront négociées, vendues, échangées entre amateurs du monde entier. Elles sont présentées sur l’un des plus beaux stands. La collection est offerte aux regards et disposée de telle sorte que tout le monde puisse en profiter.
Nous en retiendrons certaines en particulier : la Jaguar Low drag 1963, l’une des douze lightweight et l’une des deux low drag produites, l’incroyable Rolls Royce Silver Ghost de 1914 carrossée par Kellner et son intérieur avec son équipement Blériot, la Mercer 1912 jaune, l’« éternel » de l’automobile sportive sans doute et la Maserati 250 F 1955 ex-Behra.
Jaguar
Jaguar comme Land Rover semblent ne jamais s’être autant intéressés à leur glorieux passé que depuis qu’ils sont aux mains du groupe indien Tata. Nous ne développerons pas les remises à neuf des premiers Range Rover par le département « Classic » qui vous permet de jouer sinon au gentleman farmer du moins à l’homme de goût moyennant le coût du haut de gamme actuel.
Concernant Jaguar, il s’agit de gloire véritablement. Oserai – je parler de « gloire au hasard », en effet le constructeur se fait le spécialiste des séries « Continuation ». Donc authentiques productions et non répliques. Avec les bons numéros de châssis et moteurs. Elles seront « matching numbers » comme les aiment les intégristes de la collectionite.
Ca a commencé avec la E type Lightweight en 2014-2015. Initialement 18 voitures devaient être construites en 1963. Mais seulement 12 sont sorties d’usine. Jaguar a donc lancé la production des 6 manquantes. En 2016 ça a été au tour de la XKSS. Initialement conçue pour recycler en version routière les types D invendues. Las, l’incendie de l’usine de Browns Lane le 12 février 1957, mit un terme au projet alors que seules 16 voitures sur 25 avaient été produites. Neuf XKSS « continuation » sont donc en cours de production.
Cette année c’est à la type D d’entrer dans la danse. Seules 75 d’entres elles ont vu le jour en 1955-56. Sur 100 prévues. 25 type D continuation sont donc lancées. Disponibles soit en nez court de 1955 ou nez long de 1956.
Quelle sera la prochaine ? XJ 13 dont seul un exemplaire fut construit en 1966, XJC Groupe 2 ?…
William I’Anson Ltd
L’amie Carol Quiniou officie sur le stand. Parmi les belles autos présentes, on retiendra la BRM P 160 de 1973 pilotée par Clay Regazzoni et Jean-Pierre Beltoise cette année-là. Niki Lauda étant le troisième pilote de l’écurie. Le modèle exposé est au nom de Howden Ganley. Nous n’avons pas réussi à savoir pourquoi, puisqu’il semble n’avoir été engagé en F1 cette année-là que sur les Iso Marlboro de Frank Williams.
Nous nous sommes également attardés sur la petite Alpine A 220 3 Litres version courte et homologuée pour la route en vue du Rallye des Cévennes 1969. Ce châssis 1731 a également participé deux fois aux 24 h du Mans en 1968 et 1969 pilotée notamment par Jean-Pierre Jabouille, Jean-Pierre Nicolas, Jean-Luc Thérier.
Sur ce stand est passé Bernie Ecclestone. En visite de courtoisie ? Quand la passion vous tient…
Mercedes
Pas vu l’habituel stand de la marque cette année. Mais de nombreuses Mercedes Pagode, Gullwings et roadsters étaient présentes chez plusieurs marchands spécialisés ou non. Nous n’avions encore jamais vu de Pagode à 300 000 € ou de cabriolets 280 S 3.5 l à 500 000 € et plus. C’est chose faite grâce à Brabus. Deux ans de garantie. Quand même…
Lambo Lembo
Franco Lembo – Automobilia était présent comme il l’était à Epoqu’Auto. Etonnement, pas de Porsche sur son stand. Il nous réserve une vente aux enchères dédiée à Monaco le 20 juillet 2018. 25 Porsche exceptionnelles et 25 Rolex Daytona. Les deux fêtent leurs 55 ans. Pas de Porsche mais des Lamborghini, des motos et des Facel Vega. Un LM 002 a attiré notre attention. Le SUV le plus fou jamais construit. Quand les bobos avaient du panache !
Artcurial
Encore une grosse vente cette année. Plusieurs collections notamment, dix pour être précis. Volante. Amateur d’anglaises. JC Miloé. Amateur parisien. Reinders. Passionné de supercars. JG Roger. Rallyman français. Broual. Guélon. De nombreuses voitures sans prix de réserve. Apparemment 90 % des lots ont été vendus. Un mystère cependant, l’absence de la Ferrari 250/275 P qui a remporté Le Mans en 1964 avec Guichet et Vaccarella. Pourtant annoncée, il se dit qu’elle a fait l’objet d’un accord de vente global entre le propriétaire – La famille Bardinon – et un acheteur américain qui aurait signé pour 300 millions de dollars, l’achat en lot des douze dernières Ferrari de la collection. Information donnée sous toutes réserves et lue sur le net.
Mais où sont les artistes ?
Cette année les artistes n’ont pas été gâtés au salon Retromobile Paris. Des allées isolées en fond de pavillon 1, des stands ordonnés bizarrement, des courants d’air qui nous a valu de voir nos amis bien emmitouflés. Bref : qu’a-t-il pris à l’organisateur ?
Coups de cœur
Diner Classic Courses
Exceptionnelle occasion que celle d’organiser notre dîner annuel dans les locaux de l’Automobile Club de France. Stanley Rose comme invité accompagné de Philippe Guyé qui vient de lui rendre hommage avec un livre exceptionnel disponible aux éditions Jamval. Nous avons pu échanger avec eux en bénéficiant de la présence de plusieurs toiles de ce grand peintre.
Notes
1 : Robin Herd auteur de la M2 et de la M7, Gordon Coppuck auteur de la M23, Gordon Murray auteur des McLaren de l’ère Senna – Prost et de la super car McLaren F1.
2 : La Solido était la McLaren M8B