Un mirage dans un désert d’émotions
De l’uniformité naît, dit-on, l’ennui. Le fait marquant de ce G.P. d’Autriche 2014 est bien là : l’ennui. Que s’était-il passé à Montréal ? Avait-on eu la berlue ? Ricciardo, Red Bull, Renault : tout n’avait-il été qu’illusion au Canada ?
Johnny RIVES
Car à Zeltweg – pardon : sur le Red Bull Ring – le retour à la normale a été consternant. On ne s’étendra pas sur l’émasculation d’un circuit qui fut grandiose en son temps et dont il ne reste plus qu’un ersatz. Contentons-nous – terme particulièrement approprié ! – du déroulement de la course qui a entrainé les dormeurs dans une sieste réparatrice dans la plupart des foyers, ce qui ne doit réjouir aucune des chaines télévisées concernées que ce soit en France ou partout dans le monde. Les Grands Prix de F1, comparés aux avalanches de buts et aux divines surprises dont peut se targuer le « Mundial de futeball », font nettement pencher la balance du côté… qui n’est pas le leur !
Après un prometteur et trompeur G.P. du Canada, le retour à la normale a été affligeant. La pression exercée tout au long du parcours par Lewis Hamilton pour tenter de pousser Nico Rosberg à la faute est restée vaine. Et Nico a triomphé justement là où, 32 ans plus tôt, son papa Keke Rosberg avait frôlé une victoire qui, pour 0’’050 (cinq centièmes de seconde !) était allée à Elio de Angelis.
Ce nouveau doublé des Mercedes aura eu un point positif concernant l’ambiance régnant entre les deux jeunes lions : Lewis Hamilton semble avoir mis de l’eau dans son vin. Il a fait, contre la mauvaise fortune d’avoir fini 2e derrière son rival, un sourire rassurant.
A part Rosberg et Hamilton qui avons-nous remarqué dans ce G.P. d’Autriche ? Les Williams bien sûr, dont l’exploit en qualification n’a pu être confirmé que par une 3e et une 4e places – mais loin, très loin devant tous les autres. Bottas, rapide et très solide, pourrait être un des pilotes en vue lors de la saison des transferts qui ne tardera pas à alimenter la chronique.
On a vu Perez aussi, qui s’est bien rattrapé de la sanction écopée à Montréal. Perez qui use moins ses pneus que les autres, on s’en est encore aperçu ici. Hélas pour lui, ça ne lui a rien rapporté puisque comme la plupart il en a changé deux fois.
On a vu également Fernando Alonso qui, une fois encore, a laissé loin derrière lui Raïkkonen, pourtant opiniâtre.
Et puis on a vu enfin – mais c’est un euphémisme – nos trois Français, bien discrets, bien timides au volant de F1 ayant surtout l’inconvénient de ne pas être propulsées par des moteurs Mercedes. Mention spéciale pour Jules Bianchi, le moins bien armé des trois mais dont la conviction ne peut pas être mise en doute.
A l’issue de cette course terriblement frustrante pour les couleurs de son équipe, Christian Horner y est allé d’un sévère plaidoyer pour se plaindre des moteurs Renault. Sévère mais juste, à n’en pas douter. Il les a critiqués dans tous les domaines : performances et fiabilité. Ce qui l’a porté à réclamer une remise en cause profonde de l’entité Renault F1 dont les triomphes enchaînés entre 2010 et 2013, quatre saisons de succès incontestés couronnées par quatre titre mondiaux, paraissent d’un seul coup réduits à néant. Dure loi du sport ? Certes. Mais quelles en seront les conséquences ?
On n’a pas atteint la mi-saison et au classement des équipes Mercedes compte deux fois plus de points que Red Bull-Renault et trois fois plus que Ferrari !
En espérant limiter les dépenses des motoristes le gouvernement du sport automobile mondial a interdit toute remise en cause fondamentale des moteurs une fois la saison entamée. Dans ces conditions, on voit mal comment Renault et Ferrari pourront rattraper leur retard sur Mercedes. En attendant 2015, faut-il, pauvres de nous, se préparer à d’autres G.P. d’Autriche ?
Mais alors, ce Grand Prix du Canada de début juin, ça n’était donc qu’un mirage dans un désert d’émotions ?