Ces photos donnent la mesure de la passion et de la frustration en même temps. Passion d’être dans le saint des saints, frustration de l’éloignement imposé par toutes les réglementations auxquelles sont confrontés les amateurs. La passion se nourrit de concret, pas d’abstraction. Ces moments de proximité avec la compétition et les pilotes ont nourri la passion des adolescents que nous avons été pour des décennies. François Coeuret nous a transmis le résumé de la course que vous trouverez en fin de note.
Classic COURSES
Se retrouver à 16 ans dans les box puis sur la grille de départ des 1000 km de Paris, ça marque infailliblement. Le pater m’avait confié son vieux kodak et « tonton Gégé » qui bossait pour Total son brassard assistance concurrent…Des moments inoubliables…
Quelques instants avant le départ, JPB va prendre le premier relai tandis qu’Amon semble distrait.
JPB : concentration avant l’assaut. La 660 enrhuma toute la grille au départ, la 917 de Marko va petit à petit remonter, lui disputant la première place qu’elle lui recèdera, puis ce fut l’abandon de la française alors en tête : boîte bloquée.
Helmut Marko :(associé à Weber sur 917 spider type intersérie) il révise son premier tour en espérant mettre une valise au français en début de course, ce sera l’inverse /Abandon moteur cassé (la seconde 917 spider de Larrousse Kinnunen finira seconde).
La 917 K victorieuse (Bell-Van Lennep) tirera son épingle du jeu malgré une sortie sous la pluie, moins véloce que les spider, elle jouera la résistance, remportant le dernier succès du modèle avant l’ultime course de 917K (Piper) se déroulant à Kyalami (première victoire de la Ferrari 312PB).
Henri Pescarolo étrenne avec Stommelen l’Alfa 33TT12 mais leur course va tourner court, sortie de route dans le tour de reconnaissance à la suite d’un problème de transmission. La jeune femme qui pose sa main au dessus du séant du pilote français (non, elle ne colle pas un sticker goodyear sur son blouson !) se nomme Jacqueline Beltoise, je l’ai irrespectueusement « coupée » au cadrage.
La 512 M du Gelo racing (Loos-Pesch) : un incident de course avec sa jumelle jaune, la 512 Montjuick de Juncadella-Jabouille, va l’éliminer tandis que sa sœur abdique démarreur bloqué au stand.
Les Chevron seront battues en catégorie 2L par la Lola T 210 de swietlik-Salles.
A noter en GT : la Ferrari 375 GTB 4 non encore homologuée remporte sa future catégorie (Andruet-Ballot Lena). La pluie s’est invitée lors des deux derniers tiers de course, rendant le pilotage acrobatique sur le toboggan de Linas, précipitant les abandons.
Le résumé de la course :
Le vieillissant autodrome accueille, pour la dernière fois mais on ne le sait pas encore, les protos s’illustrant dans le cadre du Championnat du monde des marques.
Porsche a déjà remporté les lauriers de cette saison 71 et l’écurie Wyer tentera de glaner un dernier succès avec la 917K pilotée par Bell-Van Lennep. Exclus par la future réglementation limitant à 3 litres la cylindrée des Prototypes à partir de 1972, les Sport 5L font une ultime apparition en France. Pour le plus grand plaisir des spectateurs venus fouler les abords de la piste parisienne.
La firme allemande compte aussi deux spiders 917 « intersérie » au côté de la voiture de Wyer. Plus légers et puissants que cette dernière, ils sont pilotés par Marko-Weber et Larrousse-Kinnunen.
Les rivales morphologiques des Porsche, les Ferrari 512 M sont représentées par des équipes privées, Montjuich et Loss respectivement menées par Juncadella-Jabouille et Loos-Pesch, une troisième aux mains de Pam-Casoni. Deux vieillissantes Lola T 70 grossissent les rangs de la catégorie.
En 3L, la nouvelle Alfa 33/3 TT12 (Pescarolo-Stommelen) est confrontée à la Matra 660 de Beltoise-Amon, dommage, la Ferrari 312 PB n’a pas fait le déplacement. La catégorie 2L rassemble Chevron et Lola tandis qu’en GT, la Ferrari 365 GTB 4 ( Ballot Léna-Andruet) en instance d’homologation sera opposée aux 911S et à la Chevrolet Corvette de Greder-Beaumont. Le décor est planté et les acteurs prêts à en découdre.
Les essais vont dégager une hiérarchie surprenante, les Spider 917, dans leur tenue d’épouvantails ne vont pas jouer totalement les premiers rôles sur le « toboggan » de Linas. Marko tient la pôle devant Beltoise mais pour 2/100 de sec. seulement, suivent Bell, Jabouille, Pescarolo et le second Spider de Larrousse.
Une piste légèrement humide accueille les concurrents dimanche matin et Pescarolo, en slick, va sortir au début du tour de reconnaissance. Il rentre à pied avant même le départ. Beltoise va réaliser une envolée d’anthologie, creusant dès le premier tour un écart de plus de 7 secondes ! Les spectateurs postés dans les chicanes de l’anneau n’en reviennent pas, Bébel joue dans une autre cour ! Il comptera jusqu’à 27 sec d’avance. Les trois Porsche suivent à distance.
La piste s’assèche et va permettre à Marko de revenir petit à petit sur la bleue France grâce à ses 650 cv et à l’accrochage entre Loos et Jabouille qui oblige Bébel à un freinage d’urgence. Marko passe alors la Matra.Au tiers de la course, l’Autrichien compte 15 sec d’avance sur le français qui devance Bell, Larrousse et la Ferrari de Pam-Casoni. Ensuite la Lola T 210 (Swietlik-Salles) tire son épingle du jeu en prenant l’avantage sur la Chevron de Jaussaud-Bridges en proie à des soucis d’allumage et de pneus.La pluie entre en scène avec insistance et Amon reprend la tête lorsque la voiture leader du Gesipa racing s’arrête, moteur out, non sans avoir réalisé le nouveau record du tour en 2’30’’3 (Marko).
On en est à la mi-course et Beltoise va peut-être prendre sa revanche sur la course de l’an passée qui le vit quitter le plateau de St Eutrope boîte bloquée. Las… Le même problème accable le pilote français qui renonce à Faye. La 917 Gulf va hériter de la première place, suivie du spider de Larrousse-Kinnunen dont la tenue de route perfectible sous la pluie ne permettra pas à l’équipage d’inquiéter les nouveaux leaders.Les abandons sous le déluge sont nombreux et la troisième place revient à la Ferrari Daytona de Ballot Léna-Andruet qui a réussi sa première sur circuit devant la Lola T 210 2L.
Les spectateurs quittent l’autodrome loin de se douter qu’ils devront changer de gradins et se rendre l’an prochain à Rouen Les Essarts, circuit qui sera le théâtre des prochains 1000km de Paris et du succès de Beltoise !
Source : Auto journal n° 22 – nov 1971
François Coeuret
Photos : François Coeuret
Photo de l’affiche fournie par Yves Le Bescond